La Grande Parade déclare son enthousiasme pour Les Mystères d'Héraclite !
Yan Marchand brosse un portrait vif et concis du philosophe pré-socratique, illustré par le crayon haut en couleurs de Donatien Mary. L'essentiel du message philosophique y est, articulé aux moments-clé de la biographie d'Héraclite: on le voit jeune, amoureux ingénu, quitter Éphèse pour Éleusis, sous l'autorité de son père, dans le but de s'initier aux mystères de Déméter.
On le suit dans les limbes psychédéliques de cette rencontre avec la déesse, et dont il sort frappé de désillusion. Le voilà remettant en question toutes les certitudes qu'il croyait avoir confortablement acquises sur la vie jusque là. Aussi revient-il chez son père désabusé et rebelle: il a compris que la vie sociale et politique est mensongère, ce qui le met sur la voie de la sagesse et fait de lui le philosophe dont l'histoire des idées retiendra surtout la fameuse affirmation : la vie est un mouvement perpétuel où tout et son contraire se mélangent et naissent l'un de l'autre. Le propos alertera les petits lecteurs de Platon, qu'on aurait tort de prendre pour les perdeaux de l'année... mais il effraiera peut-être leurs parents, si, à l'instar du père du jeune révolté, un Bloson dépité par son rejeton, ceux-ci souhaitent élever une progéniture qui, surtout, ne fasse pas de vagues vis-à-vis de l'ordre établi, accepte sagement les mariages arrangés, les singeries mondaines et l'hypocrisie économico-politique, tout en daignant bien honorer la patrie et les dieux qu'on lui désignera comme objets d'adoration sans broncher. Ouvrage donc à ne pas mettre entre toutes les mains des parents? Car aux enfants, toute sagesse est bonne à dire et à dessiner. Beau défi relevé par le présent travail. On ne s'en étonnera pas, venant de cette courageuse collection pour la jeunesse, "les petits Platons", joyeusement subversive puisque d'ambition philosophique. Par où la littérature de jeunesse rejoint sa soeur aînée, amante de la sagesse, au panthéon des empêcheurs de tourner en rond.