Le grand quotidien suisse Le Temps a mis Descartes et son camarade Anatole Archimède à l'honneur aujourd'hui, annonçant la nouvelle que toute l'Helvétie attendait... Les petits Platons arrivent en librairie !
Les petits Platons inscrivent les pensées de Descartes ou de Lao-Tseu dans les récits de leur vie. Ils arrivent en Suisse romande.
Qui se souvient que Kant avait une amoureuse ? Que Socrate, par contre, trouvait son épouse insupportable ? Et que le perroquet revêt une grande importance dans le développement de la pensée cartésienne ? Pour les adultes qui n’ont guère approché les philosophes depuis le bac, la collection Les petits Platons est autrement plus plaisante que Wikipédia pour réviser. Pourtant, ces récits qui humanisent des pensées souvent perçues comme abstraites ne s’adressent pas à eux. Mais à leurs enfants. Idéal pour qui souhaite leur transmettre une autre image du philosophe que celle de Bernard-Henri Lévy aperçue à la télévision. D’autant plus que les illustrations, confiées à différents artistes, fonctionnent de manière tout à fait organique et heureuse avec le récit.
Jean Paul Mongin, directeur de ces éditions novatrices, titulaire d’un master de philosophie en Sorbonne, a écrit les quatre premiers ouvrages. «Ce n’était pas mon idée de départ. Je suis allé voir des universitaires, mais je me suis heurté à deux écueils. Soit ils me rendaient des biographies et oubliaient les pensées, soit l’histoire n’était que prétexte, sans rapport avec le discours philosophique. J’ai donc testé le principe moi-même avec des philosophes que je connais bien. Pour Leibniz, j’ai même une vraie affection.»
Les premiers récits servent désormais de modèles aux auteurs de la série. «Il est crucial de trouver la bonne fiction qui permette de mettre en scène une vision du monde», explique Jean Paul Mongin. Déjà, cinq titres sont disponibles. Outre Leibniz, le fondateur de la collection s’est aussi occupé de Kant, saint Augustin et Descartes. La sinologue allemande Miriam Henke raconte Lao-Tseu et sa quête de la Voie. Ces albums débarqueront dans les librairies romandes fin juin. On peut aussi les commander sur le site des petits Platons, qui fourmille de références pour les parents et les enseignants, et de jeux pour les philosophes en herbe (essayez donc de faire passer Kant par les sept ponts de Königsberg…).
Jean Paul Mongin compte éditer une dizaine de titres par an. Il a déjà une liste d’une cinquantaine de philosophes. A l’image des premiers ouvrages, son envie est de présenter aux enfants (lecteurs cibles: entre 9 et 14 ans) une grande variété de pensées à travers les siècles et les continents. Et de citer, au fil de la conversation, Averroès, Habermas, Nicolas de Cues, Machiavel… Parmi les prochains titres, on pourra découvrir un Ricœur raconté par son ami Olivier Abel, un Marx, et un Spinoza. C’est Raphaël Enthoven qui raconte le penseur néerlandais, à travers sa passion pour les araignées… «Il a découvert la collection des petits Platons grâce à son fils Aurélien. Nous nous sommes rencontrés et nous avons identifié cette accroche pour évoquer la question de l’immanence de Dieu à la nature. L’araignée dans sa toile et la mouche expriment chacune une totalité de la nature.»
Pour lui, cela peut se révéler très structurant de voir le chemin qu’ont fait ces grands penseurs avec leur questionnement. C’est une belle stimulation à faire advenir sa propre pensée. «C’est fascinant quand on est enfant de se rendre compte que les questions qu’on se pose ont déjà titillé d’autres personnes 500 ans, 2500 ans avant nous!» Il n’en dénigre pas pour autant d’autres approches: «La plupart des ouvrages de philosophie pour enfants ont pour point de départ les questions des enfants, et c’est très bien. Ils aident à articuler ces questionnements.»
Et Platon dans tout ça? «La philosophie n’existe que comme déploiement du discours initial qu’est le platonisme. D’où le titre de la collection: tous les philosophes sont des petits Platons!» Platon est déjà très clairement présent dans L a Mort du divin Socrate, puisque c’est en grande partie grâce à lui qu’on connaît l’homme à la ciguë. Et sa présence continuera à ponctuer les parutions. L’an prochain, les enfants auront droit à une vulgarisation du Banquet. Avant celle de La République.