Opalivres, l'Office pour la promotion et l'animation des livres pour la jeunesse, a été séduit par Hannah Arendt et Kierkegaard !
Le petit théâtre de Hannah Arendt
Comment évoquer pour les jeunes lecteurs la personnalité et la pensée de cette grande dame de la philosophie du vingtième siècle??
L’auteur Marion Muller- Colard crée un dialogue improbable mais psychanalytiquement crédible entre la femme écrivain au terme de sa vie et la petite fille qu’elle a été : agacée puis séduite par les questions enfantines, la « penseuse de terrain » entraîne la petite fille dans « son » théâtre ; là où « raconter doit être agir ».
L’auteur met en scène les deux personnages dans le petit théâtre parce que « une histoire qui mérite d’être racontée est une histoire qui a des spectateurs pour la juger; » : déclare Hannah Arendt.
Et puis s’ensuit une aventure qui unit les deux personnages et les entraîne « dans les pièges de l’histoire » : l’obscurité de la forêt le loup, puis les hommes-bureaux.
Le lecteur est amené à réfléchir, à comprendre la pensée « en action » de la philosophe : par exemple : « Je ne suis jamais nostalgique du passé. Je suis nostalgique de l’infinie possibilité de commencer » et la chance permanente de nouveaux commencements réside précisément dans l’existence des enfants…
Une lecture très attrayante et soutenue par des dessins à la fois délicats et explicites.
L’ouvrage s’ouvre et s’achève sur la notion du palindrome, car « Hannah » est un mot qui peut se lire dans les deux sens, comme dans le mouvement de la vie : les fins peuvent être les commencements.
Une très belle princesse sirène rêvait de se marier : le roi et la reine donnèrent un bal dans leur palais au fond des mers ; le plus beau et le plus doux des tritons plut à la jeune sirène mais le lendemain elle ressentit une profonde angoisse et déclara « je veux diriger ma vie ».
Alors, pour s’éloigner le plus loin possible de son royaume, elle nagea longtemps... et désespérée se dirigea vers une lumière : elle aborda les quais de Copenhague.
Là, elle découvre l’animation du port, l’élégance des femmes, la caresse du soleil sur sa peau : elle oublia son désespoir ponctuellement… alors apparut un promeneur, Kierkegaard en personne, qui s’entretient avec la jeune sirène : il se réjouit de la conscience qu’elle a de son désespoir et de la chance qu’elle a de pouvoir choisir librement de devenir complètement elle-même.
La plus belle des princesses promise au plus heureux des destins au fond des mers parviendra-t-elle à trouver le parfait accord avec elle-même ?!
Les auteurs ont mis en scène cette aventure « fabuleuse », métaphore de la recherche de « soi » et de la quête du bonheur… à travers l’évocation personnalisée de la pensée de cet existentialisme chrétien dont Soren Kierkegaard est l’initiateur.
Pour éclairer la portée du texte présent et la pensée du philosophe : « … l’existence est tout le contraire d’un monde clos ; elle est ouverture, rupture, discontinuité. Exister, c’est être là, inachevé, séparé, hors de tout système et hors de toute abstraction. » Il donne une place privilégiée à l’individu, car, à ses yeux, l’important est d’être subjectif ; la subjectivité, c’est la vérité et c’est l’erreur !
Une lecture aisée, un récit dynamique, des personnages et des scènes entre réalité et univers fabuleux, propres à réjouir les jeunes lecteurs.
Les illustrations sont par le trait et la couleur particulièrement réussies : certaines suggèrent par leur fluidité et les couleurs les scènes au fond des mers et d’autres, dans un effet de contrastes, dessinent par le détail le décor et les personnages du port.
Les illustrations constituent une lecture à part entière et méritent une attention toute particulière du lecteur.